Il y avait des jours comme ça où, clairement, les choses n’étaient pas supposées se passer normalement. Et tandis qu’il était assis derrière le comptoir où il accueillait les rares visiteurs de son musée, buvant un thé tranquillement (le professeur avait refusé de laisser sa dernière et désastreuse expérience avec une tasse de thé amoindrir son amour pour la plus anglaise des boissons chaudes), Layton ne réalisait pas encore à quel point ce jour était un de ceux là. Il se remettait doucement des récents évènements, réadaptant son mode de vie tel qu’il avait été avant… avant que son alter ego maléfique ne prenne les commandes de son corps. La chose ne se faisait pas sans heurts, considérant qu’il avait évité toute présence pendant plusieurs jours, et qu’il avait pris un coup plus dur qu’il ne voulait bien l’admettre, mais l’archéologue n’avait jamais été du genre à se laisser abattre, et refusait de céder à Allen cette victoire sur lui-même. Ainsi, il avait aujourd’hui décidé de rouvrir enfin le musée (non pas qu’il s’attendit à y voir foule de toute façon) et de reprendre les choses en main. Il ne donnerait pas la satisfaction au sorcier qui l’avait empoisonné de voir qu’il avait été atteint par ce qu’il avait découvert sur lui-même durant ces quelques jours où il avait été contraint de laisser les aspects les plus noirs et les plus refoulés de sa personnalité s’exprimer. Au fond, il en était ressorti changé, conscient qu’il y avait une partie de lui-même qui n’avait rien du gentleman que tout le monde connaissait. Evidemment, ce démon existait en tout être vivant (même virtuel) mais le savoir et découvrir ainsi son visage étaient deux choses bien différentes. Heureusement, Hershel restait convaincu que la valeur d’une personne se mesurait à ses actes et pas à ses pulsions les plus sombres : en avoir était humain, agir dessus était franchir la limite du bien et du mal. Une limite qu’il n’avait jamais volontairement franchie. Et il était décidé à prouver à Allen la force de sa conviction. Mais pas sans un petit retour de son cru. Moins par désir de vengeance qu’il ne nourrissait pas (du moins, que cette partie de lui ne nourrissait pas) que par désir de justice, et peut-être le faible espoir que si l’expérience l’avait fait prendre conscience de certaines choses, la situation inversée aurait le même impact sur le sorcier, mais avec des retombées plus positives.

Ce jour était ainsi décidément banal pour le professeur, assis derrière le bureau, les jambes croisées, thé dans une main, l’autre occupée à tracer quelques notes sur le papier, déchiffrant quelques énigmes qu’il découvrait encore parfois dans les coins les plus oubliés de son musée. Il n’eut cependant pas à réfléchir longtemps avant d’en trouver la réponse. Probable qu’elle n’aurait pas valu plus que vingt picarats. Ce fut à ce moment qu’il vit le contenu de sa tasse se troubler de façon étrange. Lui-même ne sentait rien, mais il entendit bientôt des bruits de pas se diriger vers le musée à vive allure, accompagnés d’une lumière si vive qu’elle en était presque aveuglante. Que diable se passait-il ? Se redressant, il contourna le comptoir d’un air intrigué pour s’approcher, mais il n’en eut pas besoin, se retrouvant bien vite nez à nez avec la dernière personne au monde qu’il s’attendait à trouver dans son musée : Allen Dark. Venu contempler les effets de sa potion ? Non, à en juger l’étrange objet sphérique qu’il tenait dans sa main (encore bien vite dissimulée dans son dos, ce qui n’eut pas grand effet considérant le rayonnement surnaturel qu’il émettait), il avait d’autres idées en têtes. Et rien de bon, le connaissant. D’où venait cet objet ? Pas de son propre jeu, il en était quasiment certain. Mais cela ne l’empêcha bien sûr pas de provoquer un peu Layton au passage.

« Ah Hershel, je parie que je t'ai manqué. Vois comme je suis généreux de venir te rendre une petite visite ! Tu m'as l'air en forme, mieux que lors de notre dernière rencontre je dois dire. Comment se sont passé ces dernières semaines ? »

Layton n’eut pas à se forcer pour rester calme et garder un visage neutre. Il n’était pas celui que la potion avait révélé, et comptait bien le prouver. Tandis que son double aurait réagi de façon agacée et impulsive, il esquissa un petit sourire cordial, convaincu que de toute façon il aurait un jour ou l’autre l’occasion de donner une leçon à son cher rival. Il écarta légèrement les mains :

« Comme tu le vois, Allen, je me porte à merveille. » Devinant des ombres se mouvoir dans le dos de ce dernier, il leva les yeux brièvement dans cette direction avant de reporter son attention sur Allen et d’ajouta calmement, son sourire s’étirant très légèrement : « Je t’aurais bien recommandé l’une ou l’autre énigme de mon cru puisque tu es là, mais j’ai le sentiment que tu n’es pas venu pour ça… et que tu vas avoir de la visite très prochainement. »

Oui, à n’en pas douter les deux Assassins qui se dirigeaient dans sa direction ne venaient pas non plus pour son musée (ce qui était fort dommage), et il avait à présent sa petite idée quant à l’endroit d’où venait la petite sphère dorée… et de ce dont elle était capable entre les mains d’Allen.

Allen & Altaïr & Ganon

Si les choses n’avaient pas dû être faciles pour Altaïr suite à leur dernière entrevue, elles ne l’étaient pas beaucoup plus pour Malik. Il avait conscience d’avoir commis quelque chose d’irréparable, quelque chose qui détériorait leur relation chaque jour un peu plus à coup d’indifférence et d’éloignement, en plus d’avoir profondément heurté son ami, ce qui était réellement la dernière chose qu’il souhaitait. Il savait qu’il aurait dû faire le premier pas. Revenir vers lui. S’excuser. Mais outre le fait que ce geste était des plus difficiles pour Malik (qui n'était peut-être pas aussi fier que son ami, mais assez pour lui rendre la perspective pénible) cela n’aurait rien effacé, et surtout, la déclaration et le baiser d’Altaïr avaient réveillé des choses en lui qu’il ne soupçonnait pas et qu’il ne pouvait plus ignorer. Ou plutôt, ils avaient exposés ces choses qui étaient déjà là. Depuis combien de temps, il n’aurait su le dire. Mais sa visite à Alden n’avait pas été innocente, et il le savait. Il avait inconsciemment tenté de s’en préserver, persuadé qu’Altaïr ne pourrait pas partager ses sentiments et encore moins les approuver, tandis qu’une plus petite part de lui y voyait presque une trahison envers son frère. Seulement, il ne pouvait plus fermer les yeux et nier ce qui se passait en lui depuis cet incident. La vérité, c’était qu’il avait encore du mal à croire ce qui s’était passé, mais la façon dont Altaïr l’évitait chassait tout doute quant à la sincérité de ses propos. Ils ne faisaient que se croiser, plus souvent par obligation que par choix, et leurs échanges, même dans le jeu, avaient quelque chose de tendu que seul eux-mêmes pouvaient percevoir. Malik savait sans l’ombre d’un doute que s’il souhaitait une réconciliation (à supposer qu’elle était possible), ce serait à lui de faire le premier pas. Il avait rejeté Altaïr de la pire des façons ; en reniant ses sentiments, et associé à l’ego de ce dernier, il n’y avait aucune chance pour que l’Assassin revienne jamais vers lui s’il ne s’en chargeait pas. Et l’envie ne manquait pas. Il détestait la façon dont tous deux s’ignoraient, le rappelant à leurs débuts mais avec encore plus de distance et de froideur encore. Il voulait retrouver son ami. Mais voilà, ce qui avait été exposé ce jour là le laissait penser qu’il voulait plus qu’un ami. Et il ne pouvait revenir vers Altaïr sans être absolument sûr de lui. Il ne ferait pas l’erreur de le blesser deux fois. Hélas, il était accablé de doutes. Sa raison lui dictait une chose, son cœur, une autre. Ses nuits étaient courtes, harassé qu’il était par ses pensées, et ses journées fatigantes, bercées par une solitude amère, loin de la camaraderie qu’il avait fini par apprécier. Ce qui était certain, c’était que les choses ne pouvaient durer ainsi, il ne le permettrait pas. Mais plus il attendait, et plus lui parler deviendrait difficile, il en avait conscience.

Tout en rangeant méthodiquement les quelques plumes et parchemins qui étaient parsemés sur son bureau sans hâte (il savait qu’Altaïr ne viendrait pas le chercher pour qu’ils aillent ensemble se rendre à la gare alors à quoi bon se presser ?), il prit sa décision. Quoiqu’il ressorte de la conversation, il devait au moins à son ami des excuses et des explications. Rétablir déjà leur amitié. Quant au reste… et bien, au fond, il n’y avait qu’une façon de s’assurer de ses sentiments, et c’était bien en les confrontant à celui qui les faisait naître. Il ne pouvait pas vraiment prétendre que le baiser, avec le recul et en mettant de côté le choc, lui avait été déplaisant, bien au contraire. Il devait lui parler. Il savait qu’Altaïr ne sortirait pas du jeu pour ne pas prendre le risque de le croiser à la gare, et n’irait probablement pas non plus dans un des bureaux du jeu (sans même parler du sien), le confort et l’intimité dont il y disposait étant probablement loin d’être idéal, surtout dans l’humeur où il était de s’isoler de tous. Direction Masyaf, donc.

Le trajet fut rapide, fort heureusement : l’arcade fermée, les soldats avaient autre chose à faire que de lui mettre des bâtons dans les roues parce qu’il courrait trop vite, volait un cheval ou escaladait des toits. C’est en trombe qu’il entra dans la citadelle, se dirigeant aussitôt vers les appartements de son ami. Mais alors qu’il arrivait à destination, un être étrange qui n’était clairement pas issu de ce jeu déboula d’un couloir, le heurtant brièvement, bientôt suivi par Altaïr qui lui le percuta avec assez de force pour lui faire perdre l’équilibre. L’instinct du Rafik lui fit rapidement comprendre que l’heure n’était pas aux échanges pleins de sentiments, et que c’était l’urgence de la situation uniquement qui permettait à Altaïr de se trouver en sa présence sans aucune tension entre eux, mais il ne put ignorer le fourmillement qui parcourut sa main lorsque son ami s’en empara pour l’aider à se redresser et le soulagement qui l’étreignit subrepticement face à ce geste qui témoignait du fait que tout n’était pas encore perdu.

« Vite, cet homme a volé la Pomme, il ne faut pas qu'il sorte du jeu ! »

Reprenant vite ses esprits à ces paroles, il emboîta aussitôt le pas d’Altaïr qui reprit la course sans prendre le temps d’analyser la situation du qui, quoi, comment ou pourquoi : quelqu’un avait volé la Pomme, et il fallait l’intercepter à tout prix avant que cette relique de malheur ne sème le trouble – sans oublier que sans elle, leur jeu en souffrirait aussi ; elle était nécessaire à l’histoire, son absence pourrait s’apparenter à un bug et ils savaient tous ce que cela signifiait. Malgré leur course poursuite acharnée (une chose à laquelle ils étaient largement habitués), le voleur leur échappait inlassablement, témoignant de capacités qui ne pouvaient être que surnaturelles. Ils arrivèrent dans la gare et le perdirent temporairement de vue, noyé dans la foule des personnages qui quittaient leur jeu, mais bien évidemment, ce n’était pas un grand problème pour Altaïr qui possédait la vision d’Aigle et lui glissa aussitôt :

« J'ai sa trace. Il ne peut pas nous échapper. »

Hochant la tête, Malik le suivit dans un coin plus dégagé jusqu’à pénétrer dans un musée qui lui semblait assez largement désert, exception faite de deux silhouettes déjà présentes qui se faisaient face, dont l’une était sans nul doute leur voleur, qui détenait toujours la Pomme rayonnante dans le creux de sa main.
Altaïr s’avança, prenant les devants :

« Rendez-nous ceci, cela ne vous appartient pas. Vous ne savez pas à quel point cette relique est dangereuse. »

Malik ne manqua pas la main qui s’était portée à la garde de son épée, et s’éloignant juste assez de son ami pour être certain de ne pas le laisser s’échapper quelle que fut la direction qu’il décidât de prendre, il en fit autant, ajoutant :

« Quoi que vous souhaitiez en faire, vous ne pourrez pas contrôler son pouvoir alors ne faites pas quelque chose que vous risquerez de regretter. »

La situation avait escaladé pour le moins rapidement, les deux Assassins amenant encore dans leur sillage deux personnages bien connus de la sphère vidéo-ludique, la princesse Zelda et le redoutable Ganondorf qui fort heureusement ne se rangea pas aux côtés d’Allen comme on aurait pu le craindre. Mais avec ce charmant petit comité dans son musée, Layton devinait sans difficultés que les choses allaient déraper d’une façon ou d’une autre – excepté qu'il n’avait pas vraiment en tête la suite réelle des événements. Et il y avait fort à parier qu’aucun d’entre eux n’aurait pu l’anticiper. Bien que largement surpassé en nombre, dans sa folle arrogance, Dark semblait confiant que l’issue de cette discussion se jouerait en sa faveur. A cause de l’artefact ? C’était un pari risqué, surtout à en croire les Assassins ; la magie ne fonctionnait pas de la même façon dans tous les jeux, et c’était plus vrai encore ici dans la gare. Avec un objet aussi puissant qu’imprévisible, cette magie pouvait bien se retourner contre son lanceur, et à dire vrai, ce ne serait pas totalement immérité dans ce cas là, mais il y avait toujours le risque que les autres présents en fassent également les frais, et Layton avait eu sa dose de magie à effets secondaires indésirables pour encore un petit moment.

« Il semble que ton musée soit populaire aujourd'hui. Cela change des habitudes. »

Un sarcasme qui n’eut pas grand effet sur le professeur, parfaitement capable de reconnaître de la simple provocation quand il en voyait. Le but de ce musée n’avait jamais été d’attirer les foules, c’était plus un lieu de commémoration, pour lui et les autres, et il préférait largement avoir moins de visiteurs mais que ce soient de vrais passionnés des jeux de réflexion que le contraire. Il laissa donc couler la remarque, d’autant que ce n’était pas vraiment son musée qu’étaient venu voir ces visiteurs. En revanche, quelque part au fond de lui, son alter ego n’était pas d’humeur aussi conciliante. Il avait vu juste sur un point : une fois les vannes ouvertes, les refermer était devenu impossible. Celui qu’il avait été durant la semaine passé n’avait pas disparu, et il ne sommeillait plus non plus, il était là quelque part en lui et s’il pouvait l’ignorer aisément, il n’empêchait qu’il entendait chacune de ses pensées avec clarté. C’était cela, en fait, la différence : elle avait toujours été là, mais confronté à ses démons, forcé de leur faire face, il ne pouvait à présent plus ignorer cette petite voix insidieuse qui était tapie en lui. Qu’il aurait été facile de jouer le jeu, d’ouvrir la bouche et de répondre « Toi en revanche tu ne sembles pas être très populaire, mais on ne peut pas dire que ce soit un grand changement » ou quelque chose de plus cinglant. Si facile, oui. Mais Layton valait mieux que ça, et faisant appel à sa volonté, réduisit, temporairement au moins, la petite voix au silence.

« Me pensez vous idiots assassins ? Je suis un utilisateur de la magie, je sais reconnaître une relique puissante quand j'en vois une. Quant à la contrôler, je ne me fais nul souci là dessus, rares sont les choses qui me résistent. »

Il ne doutait réellement pas de lui-même… et dans la mesure où tout allait bien pour lui, il n’avait pas de raisons de commencer, mais tôt ou tard, cela se retournerait contre lui. Et plus tôt que tard si Layton parvenait à mettre son petit plan à exécution, ce dont il ne doutait pas vraiment, comptant parmi ses alliés des personnages qui possédaient eux aussi un certain nombre de talents fort utiles. Mais en attendant, c’était la Pomme qui attirait son attention. Elle émettait une sorte de vibration indicible, comme une pulsation, qui ne présageait rien de bon. Et le sourire d’Allen ne présageait rien de bon non plus. Comme à l’accoutumée, ce dernier montra qu’il ne faisait pas de favoritisme ; chacun avait le droit à sa part de moquerie et d’ironie. Ainsi Ganondorf et Zelda eurent à leur tour leur petit commentaire désobligeant et bien qu’il n’en montra rien, il était évident pour Layton que l’absence de soutien d’un personnage de son camp heurtait plus Allen qu’il ne voulait bien l’admettre.

Mais il n’eut pas le temps de se pencher plus longuement sur la question : un violent éclair lumineux aveugla soudain le professeur qui ressentit une onde de choc suffisamment puissante pour le faire tomber avec force. Durant quelques secondes, ses sens semblèrent l’avoir abandonné : le silence, rien d’autre qu’un blanc total, une absence de tout, et puis, tout revint subitement, d’abord le son, puis la vue, et il mit un certain temps à reconnaître où il était. Etait-il tombé si loin ? Non, il y avait quelque chose d’étrange. Son corps, son corps lui semblait différent. Et il y avait quelque chose au sujet de sa tête, quelque chose qui manquait… passant une main dans ses cheveux, il comprit bien vite quoi : son inséparable chapeau avait dû tomber durant la secousse qui avait ébranlé le musée. D’ailleurs, que s’était-il passé  au juste ? Prenant le temps cette fois d’examiner ses alentours, il eut pendant un bref instant l'impression que la secousse avait causer un choc traumatique et qu'il avait des hallucinations, car il voyait face à lui… et bien, il se voyait lui-même. Mais baissant les yeux sur son propre corps, il prit conscience que le phénomène était bien plus complexe, et plus ennuyeux que cela. Allons donc, prisonnier du corps d’Allen ? Il avait dû prêter le sien pendant plusieurs jours à sa part sombre, et maintenant il devait le troquer avec un autre ? Un autre, qui, si sa déduction était bonne, ne pouvait donc être que celui de Dark, à moins qu'un autre en ait hérité. Que diable s'était-il passé ?
Réalisant qu’il détenait à présent l’artefact, il baissa les yeux sur l’objet qui avait cessé de luire pour ne paraître être qu’une vulgaire sphère sans grand intérêt. Vidée de sa magie ? Il y avait tout à espérer que non.

« Qui que vous soyez, donnez moi cette Pomme, il doit y avoir moyen d'inverser le sort. »

Relevant les yeux vers lui-même – ou plutôt, Dark dans son corps – il s’observa claquer des doigts à plusieurs reprises avec un agacement grandissement, et comprit aussitôt ce qui venait de se produire. Allen avait perdu ses pouvoirs en même temps que son corps. Ce qui signifiait que… oui, il pouvait sentir la magie courir dans ses veines, faisant à présent à partie de lui. Reculant pour empêcher Allen de récupérer la Pomme – qui savait ce qu’il risquait encore de provoquer malgré lui ? – Layton leva instinctivement la main vers lui, et presque aussitôt, vit son corps être propulsé contre le bureau où il était assis quelques minutes plus tôt. Le choc se peignit sur ses traits ; le geste, pas du tout intentionnel. Il n’avait aucune idée de la façon dont il avait fait ça, cela avait semblé si simple, si naturel qu’il n’avait pas eu à réfléchir. Était-ce cela, contrôler la magie ? C’était à la fois effrayant et grisant, et pour quelqu’un comme lui, particulièrement intéressant à analyser, ce qu’il n’avait hélas pas vraiment l’occasion de faire en cet instant. D’autant qu’il avait peut-être visé Allen mais c’était sa propre enveloppe corporelle qu’il abîmait ! Mais dans quel pétrin s’était-il encore, bien malgré lui, fourré ? Se redressant tant bien que mal, il résista à l’impulsion d’aller aider Allen à en faire autant. Pas question de lui apporter la Pomme, il ne voulait pas aggraver les choses.

« Cette petite… expérience prouve donc ce que nous devinions déjà : tu ne peux contrôler cet artéfact, ni toi, ni personne. Je regrette, mais pour le moment je vais la garder. » Se tournant vers les deux Assassins – avaient-ils été touchés, eux aussi ? au premier abord, c’était difficile à dire – il ajouta, conservant son calme autant que possible : « Vous êtes sûrement les mieux placés pour savoir s’il est possible d’inverser le sort… avez-vous déjà fait une expérience similaire ? Se pourrait-il que cette relique ait en quelque sorte… sa propre volonté ? »

Si c’était le cas, quelque chose lui disait qu’ils n’étaient pas tirés d’affaire.